vendredi 14 janvier 2011

#303 – Brelan de valets

Le costaud, d'abord, fesses, bide et joues de sumo soufflées à la paille. La taille bien marquée, par contre, curieusement étroite, sans doute étranglée par la croisée serrée du baudrier où ballotte une artillerie aussi lourde que lui. Il bloque facile l'entrée de l'impasse. J'entends son souffle, entre éructation de pitbull en rut et chaudière. L'ensemble a le look d'un sablier qui égrènerait les secondes qu'il me reste à vivre.


Le petit gros, ensuite. Patachon. Rouletabille, si vous préférez, avec bille comme sphère parfaite de tas de graisse, comme yeux en boules de loto ou bouille de trouduc, pas pour les qualités morales. Lui vient d'apparaître sur le seuil d'une sorte de têt à cochons désaffecté qui s'ouvre en carré à ma gauche. Quadrature du cercle sans failles du chambranle déglingué autour de ses arrondis suiffés. Ma seule chance est qu'il pourrait ne pas s'en dégager assez vite.


Le boss, pour finir. Je l'attendais. Il vient de se glisser dans mon dos, mais je l'ai repéré à son ombre sèche de grand sec,qui s'insinue devant moi, pas plus épaisse que celle du réverbère (bigleux le réverbère, il n'y a rien à attendre des municipalités semi-rurales après 23h). Deux pattes immenses de faucheux qui tiendraient ensemble dans une seule jambe de son slim. Torse infini d'éolienne. Au-dessus de toute cette verticalité, s'allonge, noire et horizontale, la visière d'une casquette. À l'endroit, la casquette. Aucune chance de voir sa tronche, mais on ne sera pas forcé de causer verlan en se canardant. C'est déjà ça.

3 commentaires:

  1. Excellent début de roman! Tenir ce style impeccable pendant 250 pages...
    A toi de "jouer",Magali.

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  2. Jouer seule, ce n'est pas drôle!
    Ecris les trois paragraphes suivants et je continuerai, si tu veux.

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