
Déclinaisons d'un aphorisme d'Éric Chevillard. "804… 805… 806… j’avais très rigoureusement repris le compte des herbes de mon jardin en pliant celles-ci au fur et à mesure, cette fois, afin de ne pas me tromper, mais à la 807ème ortie, ma main enflée, engourdie de douleur, n’est seulement plus capable de bouger les doigts, j’abandonne."
mercredi 14 septembre 2011
Au fond du lac
Les acacias projettent leur ombrage pastillé sur les parterres débordant de fleurs. Au bout de l’avenue, deux rangées de tilleuls encadrent le miroir du lac qui paraît vertical, tout froissé. Du papier aluminium. Un sentier tortueux descend au lac entre des pelouses rasées de près avant de s’estomper dans le sable rapporté d’une plage artificielle. Des cris d’enfants jaillissent derrière le cliquetis régulier des arroseurs automatiques. La surface sombre et huileuse du lac se ride sous le sillage des planches à voile. Sous la rive opposée, s’étale le reflet de la ville. Cité engloutie. 807 baigneurs s’interpellent, s’éclaboussent. Je sors de ma torpeur. Ça devait être là, dans ces anciennes sablières, qu’enfant je capturais salamandres et tritons. Je m’allonge sur le sable. Cris d’enfants, claquement des plongeons. Illusion. Il manque le ressac des vagues, le rire des goélands et surtout un ciel qui ne soit pas tramé d’un voile grisâtre. Mon corps tasse un sable lourd, jaune orangé comme de la poudre d’œuf. Relents de friture. Je m’immerge dans l’eau lisse et fade et nage vers les profondeurs glauques du lac.

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Magnifique.
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