dimanche 5 février 2012

L'autoroute

Dieu que ce repas avait été long ! Dieu que c’est pénible ces réunions de famille qui se terminent toujours en psychodrame ! « Mes chéris, je vous aime ! » avait pleuré la mère après son digestif, une liqueur de poire qu’en d’autres circonstances, j’aurais savouré les lèvres humides. Mais là, j’ai failli l’avaler de travers. Ça y est, elle nous le refaisait version slave. Elle ne pouvait pas s’en empêcher : réconcilions-nous dans les larmes, après l’apéro où l’on avait évité de parler politique, mon beauf de beauf ayant juste attaqué sur mon célibat, après la terrine de lapin que ma nièce avait jetée par terre « parce que c’est du lapin », après que la frangine eut houspillé mon autre beau-frère parce qu’il re-salait son gratin malgré son hypertension, d’où digression collective sur le fait de savoir si oui ou non ce repas était diététique. Réponse : non. La mère ne dit rien, mais s’enfila trois verres de rouge pour digérer la critique. Puis on avait parlé politique au moment du fromage, parce qu’il y avait du Babibel et que le rouge rappelait son passé au paternel qui arrêta de se taire. Jusqu’au café, le ton était monté, jusqu’à ce que l’autre frangine manquât d’être ébouillantée par la mère qui servait alors qu’elle était bien plus qu’un peu éméchée... merde, quelle famille.


Il était parti juste après la poire, quatre heures de route, le bon prétexte pour se sauver avant tout le monde. Devant lui, pas un chat sur l’A4, alors que de l’autre côté, bizarrement, c’était plutôt dense. Puis un peu moins au fur et à mesure qu’il se calmait. Les paires de phares s’étaient allumées avec la nuit tombante, il lui sembla qu’il pouvait à nouveau respirer. Devant lui, toujours personne. En face, deux, puis trois voitures, puis la pluie, fine, douce, sept, huit, dix, douze... À la 807e, il s’endormit.

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