Je l’ai reçue ce matin
dans ma boite mail. C’est dans trois ans. Dans trois ans et cela a
un prix. Mais trois ans ce n’est rien. Et quand on aime, quand on
aime vraiment, on ne compte pas ce qui est nécessaire à la
réalisation de son attente. Et j’ai le désir d’être une femme
quelles que soient les épreuves à traverser.
Elle vient dans trois ans
faire un concert à côté de chez moi, dans mon pays. Le mail le dit
qui envoie l’information à tous ceux qui l’aiment. Alors, le
ciel bleu peut bien s’effondrer, la terre s’écrouler, je
souscris dès aujourd’hui à un crédit pour acheter la meilleure
place. Mon amour est grand comme la peine que j’aurais à ne pas la
retrouver.
Etre une femme, c’est
avoir une destinée. La mienne est là : dans cette somme
d’argent à réunir. Et qu’importe le flou pour l’instant.
L’assistante sociale, la conseillère de Pôle Emploi, la voisine
et le compagnon disent que c’est une folie. Qu’importe. Ils sont
lâches. Quand on aime, les autres ne peuvent plus vous en conter.
J’aimerais tellement
ressembler à Céline, avec un regard de braise calme sous lequel
souffle le tempo de la passion, une chevelure de lionne blonde avec
un tombé tout à la fois lourd et souple et sans plus jamais de
pellicule, un grain de peau impeccable comme un désert que le regard
frôle mais ne pénètre pas, une bouche offerte, lisse, brillante de
promesses qui ne se violent pas.
J’aimerais tellement
ressembler à Céline. Je passerais mon temps à chanter, même
bouche fermée, même dans le silence. J’aurais des cours
d’amélioration de mes constantes et des cours d’optimisation de
mes formes. Sans douleur, sans regret, avec accompagnement. Je
répondrais à des questions pour lesquelles je connaîtrais les
réponses qu’on aurait construites. Je voyagerais. Je prendrais
beaucoup la lumière, la limousine et l’avion privé.
Je serais femme,
tellement femme. J’aurais des seins incroyables et des fesses juste
ce qu’il faut, une taille qui se fasse passage, chemin fin et
précieux entre ma cage thoracique et mon bassin. Et si le temps
passe, inexorable pour ses cruautés, c’est moi qui ferais tout
pour le regarder passer chez les autres. Et qui réussirais.
Femme, j’aurais des
hommes tout autour de moi pour s’occuper de moi et non pas moi pour
m’occuper d’un seul. Femme, on me regarderait, on me trouverait
précieuse comme une larme de princesse.
Femme, comme Céline, je
serais Femme qui chante, et qui crie, comme dans l’amour, comme
quand les gens s’imaginent des sons pour illustrer le plaisir.
Pourtant, s’il est un territoire où je suis muette, malgré les
recherches … optimiser ? redessiner ? trouver une
issue ?... c’est sur le plaisir. Sur le plaisir de Céline.
Céline, quand tu fais
l’amour, est-ce une aventure toute aussi travaillée de spontanéité
calibrée ?
Sais-tu, Femme ?
Femme, vraie, femme,
pleine, femme, quand j’aurai la réelle réponse à cette question,
j’aurai 807 raisons de ne plus me poser de question sur la
féminité. Et si un doute encore persiste, alors, arrivée à ce
stade de plénitude optimisée, là, je me suiciderai. Je suis sûre
que ça fera vendre.
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