Des langues nicobar qui sait la trajectoire ?
Qui connaît le môn-khmer, qui sait que le chaura,
Le car, nicobari, shompen ou teressa
En sont de vrais cousins, qui sait la triste histoire
Du trinkut, du katchal, ou de la camorta ?
Akkadien, sumérien, hittite, hourrite, live,
Mannois, kikai, eyak, suève et brabançon
Qu’aucune d’elles plus ne vive
Qu’à jamais nous ne connaissions
Ni la douceur de leur caresse,
Ni comment s’y nommait la fesse
Qu’importe direz-vous le son
Des langues mortes, nous vivons.
Combien d’assassinats, combien de linguicides ?
Entre langues combien de guerres fratricides ?
Auvergnat, occitan, bourguignon, champenois
Basque languedocien, ligurien, franc-comtois,
Breton, corse, lorrain, picard, wallon, normand,
Flamand occidental, limousin, arpitan,
Francique mosellan et francique rhénan,
Poitevin, provençal, romani, saintongeais,
Bruxellois, limbourgeois, tous autant en danger.
Et tous se désagrègent,
Avec ou sans Hagège
Qui n’en savait que cent.
Où sont les sept cents autres ?
Qui parle araméen, la langue des apôtres ?
Et ces six que j’ajoute, extirpés du néant,
Comme on pêche en la nasse une poignée de vives :
Khotanais, hyrcanien, bactrien chorasmian ?
Qu’aucune d’elles plus ne vive
Qu’à jamais nous ne connaissions
Ni la douceur de leur caresse,
Ni comment s’y nommait la fesse
Qu’importe direz-vous le son
Des langues mortes,
Nous vivons.
Quand on verra de ce poème
La huit cent septième édition
Quel mandarin, lettré, linguiste
Saura, penché sur son registre,
En lire sans accent mondiste
L'originale version ?
De cette langue exotique et bizarre
Retrouvée en quelque bazar,
Poubelle d'univers, résidu de l'abîme,
Saura-t-il ouïr la douceur ?
Entendra-t-il frémir son cœur ?
Qu'importe, dira-t-il, le son
De ce français et de ses rimes
De ses allitérations
Qu'importe, dira-t-il, son sort,
Je suis vivant et il est mort.
Alors là, Magali je trouve ce texte magnifique. Merci! Et je le trouve très émouvant, aussi.
RépondreSupprimerJ' ai essayé de lire
RépondreSupprimerMoi qui ne suis ni
Lettré ni soupe-au-lait
Ni mandarin ni mandarine
Tirant à hue et à dia
Cette langue urudu
Douce au cœur...
mélange unique de lectures
et d'expériences linguistiques
menées tambour battant,
avec le bâton des pleins et déliés
sur cette terre en mouvement,
sur ces 807 carnets de rimes sans fin,
où la langue s'active
et toujours nous étonne
et nous change...en passant
Merci à vous, Joël et Jean-Jacques. Mon modeste poème salué par deux vrais poètes, quel honneur!
RépondreSupprimerDe belles choses se lisent aussi en commentaire : sachez que vous êtes le bienvenu, monsieur Dorio, si vous souhaitez faire partie des doux fous huitcentseptistes.
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