mercredi 16 octobre 2013

Faire baver le bas peuple


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L’assiette d’autrui nous fait saliver parfois, jamais son sandwich
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Éric Chevillard - L'autofictif- 11 octobre 2013
 
 
   Devant l’éventail pléthorique des émissions culinaires qui semble satisfaire les appétits des citoyens téléphages, je nourris quelques inquiétudes sur les recettes et les sauces spécieuses employées par les chefs étoilés. Il se pourrait qu’ils veuillent en faire baver au bas peuple. Par une gestuelle idoine, ces sorciers en toques et en toc dessalent les 807 plaies et sucrent les 807 espoirs déçus du téléspectateur en lui faisant avaler n’importe laquelle des couleuvres ressemblant à une pilule du bonheur presque parfaite.

   Comme le dit le proverbe du pêcheur de carpe, il est inutile de claquer des dents au cul du brochet. Avant qu'ils ne finissent, tels des tournedos, sur le billard en raison de leurs appétits pantagruéliques, je rappelle aux esprits crédules que la plèbe ne passe pas à table pour être servie, mais pour offrir, sur un plateau d’argent, des minutes de matière grise en masse à son bon roi. L'ordre est la règle. Les maîtres queux et leur brigade savent cuisiner, avec soin, la molle cervelle des moutons et leur beurrer la raie — provoquant ainsi un trou dans les rangs de proctologues soucieux de faire campagne en faveur d’un dépistage des pathologies (pâtes au logis ?) du côlon.

   Coloniser les âmes sensibles et faire monter la conscience en neige, au niveau du ventre, avant qu’elle ne retombe comme un soufflé. Voilà ce qui pourrait se cacher sous la croustillante panure, pouture que l’on sert lors de festins préparés par les prêtres au sein des confréries de Panurge. Ainsi, une abondance d’air et de mauvaises graisses télévisuelles provoquerait un vieillissement prématuré du cortex. Attention à ne pas sucrer les fraises avant l’âge. À bon sonotone, salut !

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