Déclinaisons d'un aphorisme d'Éric Chevillard. "804… 805… 806… j’avais très rigoureusement repris le compte des herbes de mon jardin en pliant celles-ci au fur et à mesure, cette fois, afin de ne pas me tromper, mais à la 807ème ortie, ma main enflée, engourdie de douleur, n’est seulement plus capable de bouger les doigts, j’abandonne."
vendredi 21 septembre 2012
Loterie.
Passer le porche, accueil, c'est pour un dépistage, oui, passez la porte vitrée puis traversez la cour en diagonale, zone bleue, couleur de la mer, de sa trouille et de ses coups de bad.
Pousser la porte, bonjour, prendre un ticket, un mec titube jusqu'au bureau, il faut prendre un numéro monsieur, il sort le 808, s'approche d'elle vous avez lequel, 807, retitube et s'assied. Ils sont quatre, elle compris. Deux toutes jeunes blacks, leggings sous jupe en jean, un trentenaire costard cravate, elle veste kaki lunettes noires tenue de camouflage et le 808 qui a laissé tomber son papier par terre et sort en tanguant on dirait qu'il danse.
On l'appelle elle se lève bonjour voilà un questionnaire, un ticket, le médecin va vous appeler passez dans la salle à côté. Elle remplit le questionnaire partenaires multiples seringues échangées prostitution occasionnelle ou régulière mais qu'est ce qu'elle fout là. Le médecin vous avez des questions non, si, c'est quand les résultats, faut voir avec l'infirmière, au revoir merci. On la pique, elle sent rien, c'est quand les résultats, vendredi, entre midi et deux, merde, elle pourra pas venir. Au revoir merci avise broc d'eau gobelet en plastique boit avidement, sort, plus loin une cour des bancs, s'assied, une clope, des gens en pyjama tout abimés prennent le soleil des infirmières mangent elle regarde les fenêtres, voit son ombre pleurant derrière les carreaux, vingt-sept ans déjà, se demande si c'est les mêmes paumés qui sont là. Elle planque le ticket rose dans son portefeuille ne le perdez pas c'est pour les résultats tu parles qu'elle va pas le perdre c'est le ticket gagnant, ou perdant, elle sait pas. Elle sait pas.
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Excellent texte Émilie, peut-être ton meilleur.
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